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Le décryptage bimensuel de l'actualité juridique et statutaire

NUMERO 55 - Janvier 2025

Faits : M.A, agent de maîtrise principal, a été sanctionné par un arrêté du 17 juillet 2020 entraînant sa révocation. Cette décision a été motivée par plusieurs faits : l’utilisation de moyens du service public et de l’administration à des fins personnelles, accompagnée de la perception de rémunérations directes et personnelles de la part d’usagers ; des comportements inappropriés envers une administrée ; et une atteinte au principe de probité.

Moyens : Tout fonctionnaire ayant commis une faute dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions s’expose à une sanction disciplinaire, sans préjudice des peines prévues par la loi pénale. La révocation constitue une sanction disciplinaire de quatrième et dernier groupe.

En l’espèce, dans le cadre de ses fonctions, M. A. a été sollicité par une administrée de la commune pour l’aider à remplir un dossier d’urbanisme, en demandant une rémunération de 500 euros pour lui-même et 800 euros pour un architecte qu’il avait recommandé. Le dossier ainsi constitué était incomplet et non conforme, mais M. A. a néanmoins conseillé à l’administrée d’engager les travaux. Bien que M. A. conteste avoir utilisé sa qualité de technicien communal dans ses échanges, aucun élément du dossier ne permet de confirmer cette affirmation, contredite par les déclarations de l’administrée.

En outre, il ressort des pièces du dossier que M. A. a fait preuve d’un manque de diligence répété dans l’exécution de ses tâches, s’est présenté à plusieurs reprises en état d’ébriété sur son lieu de travail, et a fait preuve de comportements violents, incluant la séquestration de son supérieur hiérarchique. Il avait par ailleurs déjà fait l’objet d’une sanction de rétrogradation en 2008 pour manquements à ses obligations professionnelles.

Ce qu’il faut retenir : Les faits reprochés à M. A., notamment son état d’ébriété répété sur son lieu de travail et ses accès de violence ayant conduit à la séquestration de son supérieur hiérarchique, justifient pleinement la sanction de révocation.

Lien : Cour administrative d’appel de Nancy, 3 décembre 2024, n°22NC00492

La protection fonctionnelle est la protection due par l’administration à ses agents à raison de leurs fonctions. En tant qu’agent public, si vous êtes victime d’une agression ou que votre responsabilité civile ou pénale est mise en cause, en lien ou compte tenu de vos fonctions ou de votre qualité d’agent public, la collectivité publique doit vous protéger. C’est ce qui s’appelle la protection fonctionnelle.

A ce titre, la DGAFP a publié une présentation synthétique des principaux enjeux de la protection fonctionnelle. Au sommaire : les cas dans lesquels un fonctionnaire ou un non-fonctionnaire peut bénéficier de la protection fonctionnelle, les démarches à entreprendre, les mesures de protection possibles, le rejet d’une demande de protection fonctionnelle, la prise en charge des frais d’avocat…

Lien : Plaquette de présentation « La protection fonctionnelle des agents publics » publiée par la DGAFP

Faits : Mme L., secrétaire administrative de classe exceptionnelle au ministère de l’Économie et des Finances, a été détachée auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour une durée d’un an par un arrêté du 29 avril 2019. Le 30 janvier 2020, la Caisse des dépôts a décidé de ne pas renouveler son détachement. Mme L. a déposé un recours gracieux contre cette décision en mars 2020, recours rejeté en avril 2020. À la suite de ce rejet, la Caisse des dépôts a cessé de lui verser la Nouvelle Bonification Indiciaire (NBI) par un arrêté en mai 2020. Mme L. a alors saisi le tribunal administratif de Paris pour demander l’annulation de cet arrêté. Par un jugement du 14 octobre 2022, le tribunal administratif a rejeté ses demandes. Mme L. a interjeté appel de cette décision.

Moyens : Le détachement place un fonctionnaire hors de son corps d’origine tout en lui permettant de conserver ses droits à l’avancement et à la retraite dans ce corps. Il est accordé à la demande du fonctionnaire, pour une durée limitée, et peut être révoqué. À l’expiration du détachement, le fonctionnaire est réintégré dans son corps d’origine, sauf intégration dans le corps d’accueil.

En l’espèce, la décision litigieuse du 30 janvier 2020 constitue un refus de renouveler le détachement de Mme L. à son échéance, et non une révocation avant terme. En l’absence de disposition prévoyant un droit au renouvellement, Mme L. ne peut prétendre à ce dernier. Par conséquent, la décision de non-renouvellement n’a pas à être motivée au titre de l’article L. 211-2 du Code des relations entre le public et l’administration, car elle ne prive pas Mme L. d’un droit ou d’un avantage acquis.

Concernant la cessation du versement de la Nouvelle Bonification Indiciaire (NBI), celle-ci est conditionnée à l’exercice effectif de fonctions ouvrant droit à cet avantage. À la date où Mme L. a cessé de percevoir la NBI, elle n’occupait plus d’emploi à la Caisse des dépôts et consignations, ayant été réintégrée de droit au ministère de l’Économie et des Finances. En conséquence, la Caisse des dépôts était fondée à cesser le versement de la NBI, Mme L. ne remplissant plus les conditions pour en bénéficier.

Ce qu’il faut retenir : Un fonctionnaire détaché n’a aucun droit au renouvellement de son détachement à son échéance, sauf disposition contraire. De plus, la Nouvelle Bonification Indiciaire (NBI) est conditionnée à l’exercice effectif de fonctions y ouvrant droit. En cas de réintégration dans le corps d’origine, l’agent ne peut plus prétendre au versement de la NBI liée à son emploi précédent.

Lien : Cour administrative d’appel de Paris, 18 décembre 2024, n°22PA05291

Rappel sur le référé suspension : Le référé-suspension est une procédure d'urgence. Elle permet de demander au juge administratif de suspendre en urgence l'exécution d'une décision administrative dont la légalité est contestée. Les conditions d’utilisation de cette procédure sont les suivantes : 

  • Avoir déposé au préalable une requête en annulation ou en réformation contre la décision dont vous réclamez la suspension ;
  • Justifier de l'urgence qu'il y a à suspendre l'exécution de la décision ;
  • Démontrer qu'il y a de sérieuses raisons de penser que la décision est illégale ;
  • Démontrer que la décision n'est pas entièrement exécutée.

L’urgence est étudiée à la date où le juge des référés statue sur la demande de suspension.

Faits : M. B., agent au sein du Conseil départemental de l’Oise, a été sanctionné d’une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans, dont un an avec sursis. Il a saisi le tribunal administratif d’Amiens d’un référé suspension contre cette décision, mais sa demande a été rejetée. M. B. s’est alors pourvu en cassation devant le Conseil d’État sur le fondement de l’article L. 521-1 du Code de justice administrative (CJA).

Moyens : L’article L. 521-1 du CJA subordonne le référé suspension à une condition d’urgence, qui est remplie lorsque l’exécution de la décision contestée porte une atteinte grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant, ou aux intérêts qu’il défend.

En particulier, une mesure privant un agent public de la totalité de sa rémunération pour une durée excédant un mois est en principe regardée comme causant une atteinte grave et immédiate à sa situation personnelle. Toutefois, cette présomption peut être écartée si l’employeur démontre des circonstances particulières, telles que des ressources suffisantes de l’agent, des nécessités de service, ou un autre intérêt public, que le juge des référés doit apprécier globalement.

Dans cette affaire, le tribunal administratif a estimé que M. B. ne justifiait pas que la privation de son traitement pendant douze mois aurait gravement affecté ses conditions d’existence, et a conclu que la condition d’urgence n’était pas remplie. Cependant, le Conseil d’État a jugé que cette décision méconnaissait les principes de l’article L. 521-1 du CJA, et a déclaré que le juge des référés avait commis une erreur de droit. M. B. était donc fondé à demander l’annulation de l’ordonnance attaquée.

Ce qu’il faut retenir : La privation totale de rémunération d’un agent public pour une durée excédant un mois constitue, sauf circonstances particulières, une atteinte grave et immédiate justifiant la condition d’urgence pour un référé suspension. Le juge des référés doit apprécier cette urgence en tenant compte de l’ensemble des circonstances de l’espèce.

Lien : Conseil d’Etat, 18 décembre 2024, n°492519

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